Etrange gestuelle cette danse orientale. Cela fait bientôt deux siècles que le public l’a découverte à l’occasion des expositions universelles qui se tenaient dans les grandes villes européennes.
Depuis, elle hante les imaginaires du monde sans que, finalement, nul ne la connaisse totalement.
Parfois identitaire, parfois vulgaire, parfois commerciale, parfois élégante, parfois sublime, parfois folklorique, parfois sincère, parfois sans âme, elle a autant de visages et de vérités qu’il y a de femmes qui dansent.
Certains affirment qu’elle est née en Egypte antique pour célébrer les cultes des déesses qui veillaient à la fertilité du monde. Mais la fertilité n’est-elle pas une fantaisie inventée pour célébrer la sexualité subordonnée aux codes qui ordonnent la reproduction des êtres et des relations de pouvoir ? Continuer la lecture de « Danse orientale, danse de fertilité ? »
Il fut « umbilicus », puis « umbiliculus », transformé en « lonblil », modifié en « nomblil » et devenu « nombril » en français, « navel » en anglais, « ombligo » en espagnol, « nabel » en allemand et « ombelico » en italien.
La censure hollywoodienne le bannit des écrans dans les années 30. Le bikini lui offre une visibilité, mais il faut attendre les années 70 pour qu’il acquiert une respectabilité…toute relative.
Cette cicatrice qui nous rattache au monde animal des mammifères placentaires est reliée aux parois latérales du petit bassin qui se trouve délimité par la cavité abdominale en haut, le périnée en bas et les hanches sur les côtés. Ce petit bassin est l’arche où se côtoient l’argile et les boues humaines : il abrite l’appareil reproducteur, l’appareil digestif et l’appareil urinaire.
Dans les monothéismes, cette contiguïté dans le bas ventre de l’homme de la vie et de la mort contrarie beaucoup. L’anatomie dément les dogmes selon lesquels l’espèce humaine serait une création particulière, plus proche du monde céleste que du règne animal.
Cette marque d’appartenance de l’humain à la nature, et particulièrement à sa manifestation femelle, est aussi une empreinte qui différencie chacun de nous. Tous les nombrils sont uniques. De telle sorte que cette signature personnelle symbolise à la fois notre lien avec l’indifférenciation des générations et des espèces et notre individualité issue de nos héritages et de nos aptitudes.
Le nombril est donc notre attache avec l’infiniment universel et l’infiniment intime.
Il n’est donc pas surprenant qu’il soit au cœur de la danse orientale qui célèbre les unions et les séparations nécessaires au cycle de la vie à travers les états de conscience de la danseuse. Continuer la lecture de « Nombril »
Je suis chanceuse : je reçois autre chose que des factures et des avis d’imposition dans ma boite aux lettres 🙂 Je reçois des cartes 🙂 Il n’y a pas très longtemps, j’ai reçu cette belle calligraphie illustrant quelques vers du poète palestinien Mahmoud Darwich* :
« Si tu es vraiment mon aimé, compose un
Cantique des Cantiques pour moi
Et grave mon nom sur la branche d’un
grenadier, dans les jardins de Babylone. »
Ces vers évoquent la Mésopotamie et les systèmes symboliques de ses civilisations à jamais disparues où le Féminin était célébré en la personne de la déesse Inanna/Ishtar.
L’une des images attachées à la danseuse orientale est celle de courbes féminines qui forment des lignes sinueuses avec la souplesse du serpent. Il existe d’ailleurs un mouvement appelé « les bras serpent. »
Le serpent est lié à la Terre. Sa capacité à changer de peau en fait le symbole du cycle qui va de la mort à la renaissance. Nichant dans des endroits humides et/ou souterrains, il apporte aux hommes la sagesse des mystères enfouis. Sa capacité à se déplacer par la seule force des ondes de ses reptations en fait la représentation parfaite de l’énergie vitale à l’œuvre dans les entrailles de tout ce qui vit pour que jamais ne cesse le cycle des changements d’état. Le serpent est cette force qui demeure, dépassant la limite des formes différenciées des existences éphémères, qu’elles soient minérales, végétales ou animales.
De son côté, la danse orientale prend sa source dans des systèmes symboliques où elle rend manifeste l’énergie féminine. Cela ne s’arrête pas à la seule fertilité – qui est aussi un attribut de certaines divinités masculines.
J’ai deux amours 🙂 : la danse orientale et les chats. J’ai découvert grâce à mes lectures que ces deux passions sont beaucoup plus liées que je ne l’imaginais.
Dans l’Egypte antique, il y a Bastet, incarnée parfois dans un corps de chatte, parfois dans celui d’une femme à tête de chat. Fille de Rê, elle est la déesse de la joie, de la musique, de la chaleur, elle est maîtresse du foyer et protectrice des naissances. Des cérémonies lui sont consacrées durant la crue du Nil, indispensable à d’abondantes récoltes. Son culte est donc lié à la fertilité.
Dans sa forme primitive, Bastet est Sekhmet, déesse lionne envoyée sur terre par Rê pour détruire l’humanité qui conspire contre le pouvoir des dieux. Son nom signifie «la puissance.» Déesse guerrière et solaire, elle commande les maladies et la guérison. Cela fait d’elle la protectrice des médecins, tandis que les prêtres consacrés à son culte sont réputés pour leur science vétérinaire.
Si Bastet est la forme ‘domestique’ de Sekhmet, toutes deux sont les expressions d’une même énergie : celle de la Féminité qui préside à l’accroissement du monde en relation étroite avec les forces de l’univers.