Il serait possible de dire qu’il y a deux sortes d’erreur.
Les graves, qui se définissent comme la rupture involontaire de l’équilibre précaire qu’est le phénomène vivant. Tels seraient la sortie de virage à gauche, le geste qui blesse au lieu de soigner, l’atterrissage qui vire au crash …
Et puis, les nettement moins graves, qui se caractérisent par une action inattendue dans des circonstances qui en commandent une autre.
Dans la civilisation 2.0, l’objectif des exploiteurs est de transformer l’esprit humain en algorithme. De telle sorte qu’à chaque situation corresponde une seule réaction possible pour l’Humanité entière.
A cette fin, l’erreur est considérée comme une avilissement en ce qu’elle manifeste la dimension incontrôlée et inconnue de l’esprit humain. Elle est traitée comme une déchéance, alors qu’elle est une manifestation d’unicité.
L’erreur révèle ce qui nous motive et ce qui nous trouble. En ce sens, pour qui sait être attentif et capable de finesse, elle peut rendre perceptibles de hautes qualités.
Celui-là qui dit : « J’ai eu une fois de l’envergure dans les yeux d’une femme » alors que son existence incarne les adjectifs « terne » et « petit-bourgeois », celui-là reçoit beaucoup de l’erreur de celle-ci.
Ainsi, l’erreur sur scène, souvent causée par l’émotion trop vive que tu cherches à contenir, touche la sensibilité de chacun.
Un mien professeur racontait qu’il ouvrait un spectacle par un grand saut en diagonale. Un jour, les pans du rideaux de scène encore frémissants, il s’élance et …se vautre. En toute beauté. Il s’est relevé et a poursuivi sa diagonale pour sortir de scène. Ce jour-là, il a particulièrement bien dansé la suite du ballet.
L’erreur est humaine dit l’adage. Et sans aucun doute, elle est la voie la plus sûre de la perfectibilité et de la connaissance de soi.