* Article non sponsorisé
Dans notre civilisation de l’affichage et de la matière, les odeurs sont strictement contrôlées, voire bannies, aux fins de représentation.
Ainsi, une jeune fille de « bonne famille » 🙂 n’est pas censée transpirer. En effet, la sueur est considérée comme malodorante et sale.
Cette réaction vis à vis de la transpiration est un acquis de la civilisation.
Objectivement, un corps sain, propre, bien nourri, non alcoolisé et portant du linge frais, ne produit pas une sueur nauséabonde. Il est des sueurs qui « puent » : celles de la maladie et celles de la peur, les fameuses sueurs froides. Mais la mauvaise odeur ne caractérise pas la transpiration. D’ailleurs, le Larousse définit la sueur comme un « Liquide incolore, salé, sécrété par les glandes sudoripares, qui suinte par les pores de la peau. »
Non seulement, un voile humide sur une peau chauffée par le mouvement est troublant, mais, en plus, la transpiration est une signature olfactive, un message que nous diffusons à notre corps défendant.
Les scientifiques débattent pour savoir dans quelles proportions les odeurs et les phéromones agissent sur nos comportements.
Si rien n’est établi, il n’empêche que l’expression « Je ne peux pas le/la sentir » traduit bien ce plan invisible de nos relations. Il est fort probable que l’odeur d’une femme compte plus que son QI dans la réussite de sa vie amoureuse.
Freud aurait avancé que la vue devint le premier des sens à partir du moment où le singe humain fut bipède. Avant cette étape, c’est l’odorat qui aurait primé, ce qui pourrait expliquer son rôle encore primordial dans les premiers temps de la vie. Il serait également un facteur déterminant dans le coup de foudre.
Il est permis de se demander si, au fil des millénaires, ce développement exagéré de l’usage de la vue aux dépens des autres sens, ne contribuerait pas à la bestialité, au sens de la tendance à suivre ses plus bas penchants, et à la dégénérescence de l’Homme. Si l’oeil est un organe d’une sophistication époustouflante, les stimuli auxquels il répond, et les informations qu’il recueille, sont nettement moins raffinés.
L’oeil ne voit pas l’invisible, le nez le sent.
De là je conclus que les odeurs sont des éléments essentiels dans la pratique de la danse orientale.
Par leur puissance évocatrice, elles constituent un champs référentiel intense à même de faire naître les émotions susceptibles d’animer la danse. Premières gouttes de pluie, murs calcaires dans la pénombre ardente, morilles, flambée dans un vieux salon, linge séché au soleil, pelage du chat, nuque de l’être aimé qui sort du sommeil…nous sous-estimons souvent le monde olfactif qui nous comble pour peu que notre odorat soit éveillé.
Dès lors, porter un parfum pour pratiquer la danse orientale me semble une évidence. Lorsque je dansais dans les restaurants, plusieurs fois des convives ont noté cet élément qui ajoutait à l’interprétation.
Une danseuse orientale possède une signature olfactive.
Sont appelées de façon impropre « parfum » les eaux de toilette et les eaux de parfum.
Les « jus », comme les nomment les professionnels, se classent en catégories selon le rapport entre l’excipient (alcool) et le concentré. L’eau de Cologne contient le moins de concentré et le plus d’alcool. C’est elle qui s’évapore le plus vite. Viennent ensuite l’eau de toilette, l’eau de parfum, puis l’extrait, qui affiche plus de 20 % de concentré.
Depuis 1830, les chimistes connaissent les techniques qui permettent de synthétiser les molécules odorantes, voire de créer des senteurs qui n’existent pas à l’état naturel.
Chaque parfum appartient à une famille olfactive. Il existe les floraux, les boisés, les orientaux, les hespéridés, les fougères, les chyprés et les cuirs.
Etymologiquement, parfum signifierait « par la fumée ». Anti-matière par excellence, le parfum était créé sur les autels des temples antiques, et offert aux Dieux pour les apaiser et communiquer avec eux.
Le parfum appartient à l’être et non à l’avoir, et il forme son alliance avec la peau et non avec le vêtement. Il se porte aussi bien avec une paire de sneakers en fin de course qu’avec un porte-jarretelle de soie.
Je suis depuis très longtemps fidèle à la maison Guerlain, et aux deux orientaux, que sont l’Heure Bleue (1912) et Shalimar (1925).
Pour la petite histoire, l’Heure Bleue est la période entre le couché du soleil et la tombée de la nuit, laps de temps où lumières et odeurs du monde revêtent une qualité singulière.
Quant à Shalimar, le nom signifie « Temple de l’Amour » et il désigne les jardins que Shah Jahan, 3ème empereur moghol, fit créer pour son amoureuse, Mumtaz Mahal, également destinataire du Taj Mahal.